Tout le monde n’a pas la chance d’être dyslexique !
Il est possible que vous ne vous attendiez pas à tomber sur un article qui parle de dyslexie sur un site dédié au coaching et à la formation. Pourtant, il y a un lien que vous ne soupçonnez probablement pas.
En effet, je vous le dis tout de go, c’est parce que je suis dyslexique que j’excelle dans mon métier et je vais tenter de vous expliquer pourquoi.
En mettant mes doigts sur mon clavier, je suis aussi très motivée par l’idée d’aborder un sujet qui reste encore tabou aujourd’hui afin de remettre un peu les choses en perspective en ce qui concerne la dyslexie.
Contrairement aux idées généralement véhiculées, la dyslexie n’est ni une maladie, ni un handicap !
Si les gens souffrent de leur dyslexie, c’est surtout parce que notre société a beaucoup de mal à accepter ceux qui sont différents et pas « câblés » comme la majorité. Personnellement, j’espère voir cela changer définitivement et dans tous les domaines.
Ça m’a pris plusieurs décennies pour considérer qu’être dyslexique pouvait être une aubaine, tellement j’en ai pris plein la figure durant mon enfance et une bonne partie de ma vie d’adulte.
En effet, j’avais 6 ans lorsqu’on a annoncé la « nouvelle » à mes parents. Et je dois dire que cette annonce a tout changé dans ma vie de petite fille, parce que du jour au lendemain mes proches ont commencés à me considérer différemment, et je ne vous parle pas du comportement déplorable et discriminant de mes enseignants.
Pourtant, sachez qu’on estime qu’il y a entre 3 et 5% de la population française qui est dyslexique. Ce qui signifie que sur 68.170.000, il y en a 2.045.100 personnes qui sont « calibrées » différemment cognitivement parlant. Ça fait un paquet de gens !
Pourtant, rien n’a jamais été vraiment mis en place pour permettre aux personnes dyslexiques d’accepter leurs différences (que ce soit des enfants ou des adultes) et encore moins de miser sur leurs atouts naturels pour prendre leur place dans le système. En vérité, toute « l’aide » qui existe a pour but de pallier à leurs faiblesses.
C’est un peu comme si on reprochait à une personne d’avoir les yeux verts en la culpabilisant de ne pas avoir les yeux marrons comme tout le monde. Ça serait ridicule, non ! Et bien, c’est ce qu’on fait avec les personnes dyslexiques. On peut même lire sur certains sites officiels que ça se soigne, alors que c’est totalement faut, puisque ça n’est pas une maladie.
Henri Ford, Albert Einstein, Thomas Edison, Gustave Flaubert, Pablo Picasso, Bill Gates, Steven Spielberg, Mika, Johnny Halliday, Keira Knightley, Orlando Bloom, Lewis Hamilton, Agatha Christie, Jamie Oliver, Richard Branson, Steve Jobs, Daniel Pennac, etc. sont (ou étaient) tous dyslexiques.
Croyez-vous qu’on a pu les « soigner » ? Et même si on avait pu, est-ce que cela aurait été souhaitable ? Non, une grande majorité de ces personnes connues se sont débrouillées seules pour tirer avantage de leurs différences et c’est tant mieux !
Pourtant, je pense qu’on pourrait faire mieux en permettant à n’importe quel dyslexique, et surtout n’importe quel enfant, d’apprendre à connaitre sa différence pour en faire des forces sur lesquelles construire leur vie.
Parce qu’on ne peut pas dire que la planète Dyslexia soit rose. Elle est semée d’embûches totalement gratuites, qui pourraient être facilement aménageables, pour le bien-être de beaucoup de monde. En commençant par former les personnes qui les accompagnent. Je veux parler des orthophonistes.
Est-ce qu’un orthophoniste qui n’est pas dyslexique peut comprendre ce que c’est ?
Pour ma part, les orthophonistes ne m’ont jamais été d’un grand secours, malgré la quantité d’heures passées en leur compagnie. Je pense même qu’à l’époque, ils n’y comprenaient pas grand-chose et essayaient simplement de « redresser » les enfants en leur tapant sur les doigts lorsqu’ils faisaient des erreurs. C’était comme s’ils cherchaient à faire entrer un rond dans un trou carré… ça ne rentre tout simplement pas, parce que ce n’est pas adapté !
Et je ne crois pas que beaucoup de choses ont changé aujourd’hui. Du moins pas en France. Mais j’ai appris qu’en Angleterre, il y avait quelques innovations dans ce sens.
Je pense que ça serait merveilleux si on arrêtait de considérer les personnes dyslexiques comme des handicapées et qu’on cessait de mettre tous les dys dans le même panier. Elles gagneraient aussi à être accompagnées par des adultes dyslexiques, capables de les inspirer et de les voir avec des yeux différents de ceux des personnes qui les entourent et les considèrent souvent comme une charge.
Think out of the box!
Etre dyslexique, c’est être différent.
Tous les dyslexiques n’ont pas les mêmes aptitudes, mais ils ont pourtant certaines choses en commun comme le fait qu’ils :
- peuvent utiliser l’aptitude de leur cerveau pour transformer ou créer des perceptions (l’aptitude primaire).
- sont très conscients de leur environnement.
- se montrent plus curieux que la moyenne des gens.
- pensent essentiellement en image plutôt qu’en mots (d’où la difficulté qu’ils ont à apprendre à lire et à écrire).
- sont très intuitifs et perspicaces (ils perçoivent émotionnellement ce que la plupart des gens ne ressentent pas).
- pensent et perçoivent de manière multidimensionnelle en utilisant tous leurs sens.
- sont capables de vivre la pensée comme si c’était la réalité et sont souvent kinesthésiques.
- ont une imagination très vive.
Huit capacités de base qui, si elles ne sont pas supprimées ou détruites par les parents ou le système éducatif, ont deux conséquences importantes :
Une intelligence supérieure à la normale et une créativité extraordinaire.
Et c’est à partir de celles-ci que le Don de dyslexie peut faire émerger le don de l’excellence…
Rien que ça !
Personnellement, je suis très créative, plutôt habile de mes mains, douée pour faire des associations d’idées ou comprendre des choses complexes comme des systèmes et capable de ressentir des choses que les autres ressentent rarement, car je suis très kinesthésique.
Sans omettre le fait que je m’intéresse à beaucoup de choses. Trop d’après mes proches. Enfant, déjà, j’étais boulimique d’informations, donc dispersée pour les adultes qui m’entouraient, voulant impérativement que je me canalise et me concentre sur une chose à la fois. Ce qui m’est impossible encore aujourd’hui. Mais pour moi, si ça ne parait pas possible pour une personne normale, je gère parfaitement cette dispersion. Je suis très organisée.
Comment auraient-ils pu imaginer que j’allais publier des livres et me passionner pour la pédagogie, allant jusqu’à former des adultes et les accompagner dans leur vie professionnelle ?
Il faut dire que je ne cochais aucune des cases requises pour les métiers dits classiques. La curiosité et la créativité ne faisant pas partie des talents pris en compte par les enseignants traditionnels. Et ils ont tort !
Heureusement qu’un jour j’ai pu mettre à profit tout ce que j’ai étudié par moi-même. Motivée que je fusse par l’idée qu’on pût enseigner ou transmettre autrement que ce qui est proposé traditionnellement. Sachant qu’une des particularités des personnes dyslexiques c’est d’être souvent douée pour ce qui touche au relationnel et à la communication.
Ma vie a changé grâce à un livre !
Et il a fallu que je tombe « par hasard » sur un livre écrit par un dyslexique, Ronald D. Davis, publié en 1994 : »Le don de dyslexie« , pour comprendre ce qu’est véritablement une personne dyslexique. Ce qui a tout changé pour moi ! Je le recommande vivement à toutes personnes dyslexiques, ainsi qu’à tous ceux qui vivent avec elles.
Grâce à l’auteur, j’ai découvert qui j’étais réellement, quels étaient mes atouts et mes capacités cognitives, là où d’autres ne voyaient que des faiblesses, voir, des handicaps. J’avais déjà 35 ans !
Pour être honnête, ça m’a pris du temps pour transformer la perception que j’avais de moi-même et réparer ce que des années de scolarité inadaptée avaient brisé, car vous l’aurez compris, je n’ai pas eu la chance de naître dans une famille aidante. Je dirais même que ça a été le contraire, car au début, je n’ai pas su m’entourer.
Ce qui m’a sauvée, c’est aussi l’écriture… LOL !
Pour une dyslexique qui n’a pas su lire et écrire avant au moins l’âge de 10 ans, c’est plutôt amusant, non ! Pourtant, c’est la vérité.
Parce dès que j’ai pu écrire, certainement par frustration du fait que j’avais toujours de mauvaises notes en français à cause de mes fautes d’orthographe, j’ai commencé à écrire pour moi, dans de petits cahiers et je n’ai jamais arrêté.
Une fois adulte, j’ai aussi commencé à lire sur des tas de sujets en cachette, car autour de moi, les gens ne comprenaient pas pourquoi je m’intéressais à tant de choses différentes. On me trouvait dispersée !
Et comme j’ai une mémoire de poisson rouge, je me suis habituée à faire des fiches (toute une vie de fiches bristols en format A5) pour résumer toutes les informations que je récoltais dans les livres et sur les sujets qui m’intéressaient.
Plus tard, ces fiches sont devenues des cours pour les adultes et ces cours sont devenus des livres… Magique !
Ce avec quoi j’ai eu le plus de difficulté dans ma vie personnelle, c’est ma pensée systémique, car je vois apparaître de façon très logique tout ce qui ne fonctionne pas dans une situation, je comprends aussi très vite lorsqu’une personne ment (et ça, les gens n’aiment pas être démasqués !).
Le problème, c’est qu’au début, j’avais beaucoup de difficultés à me taire, parce que je prenais souvent de façon personnelle les comportements des autres. Je pensais que les gens ME mentaient, alors que la plupart du temps, ils se mentent à eux-mêmes. Lorsque j’étais enfant, c’était terrible, parce que les adultes cherchaient à me remettre « à ma place » et je trouvais cela très injuste.
Une autre difficulté que j’ai rencontrée, c’est que je ressens le besoin de créer des choses tout le temps et dans des domaines très variés. Comme ma famille m’avait littéralement interdit de dessiner, j’ai étendu ma créativité à d’autres choses acceptables pour mon entourage (bricolage, couture, confection de bijoux et de chapeaux, cuisine aussi. J’adore réparer les choses anciennes et cassées)
C’est seulement une fois adulte et autonome que j’aie osé m’exprimer en m’inscrivant dans une école d’architecture d’intérieur grâce à l’argent que j’avais gagné en travaillant en tant que commerciale. Puis j’ai continué en faisant des études de costumière.
Mais j’ai vite été rattrapée par cette cochonnerie de syndrome de l’imposteur. Parce que même si j’ai réussi à travailler dans le milieu du cinéma, mes parents et mon petit ami de l’époque me disaient constamment que ce que je faisais n’était pas sérieux, que c’était une passade et que je devais faire quelque chose de stable. Alors, j’ai abandonné et je suis retournée au métier de commerciale, mais dans la bureautique cette fois, puis dans l’informatique. (Est-ce que je vous ai dit que j’étais douée en math et en informatique ?)
Et c’est comme ça que je suis devenue formatrice, puis coach professionnelle !
Vendre du matériel, je n’aimais pas ça du tout. Mais vendre des idées, j’adorais ça. Parce qu’en réalité, former des personnes à quelque chose qu’elles ne connaissent pas, ça consiste à leur vendre l’idée de faire ce qu’elles ne savent pas. Et les dyslexiques sont doués pour transmettre, communiquer et convaincre !
Au début, j’ai animé des formations sur des logiciels Microsoft et Internet. Mais très vite, j’ai osé aborder des sujets plus personnels. C’est comme cela que je me suis intéressée à la Communication Interpersonnelle et à tout un tas de choses que vous pourrez aisément découvrir dans ce site ou sur mon Profil LinkedIn.
Ma petite revanche à moi !
Me lancer dans le métier de la formation et de l’accompagnement individuel (ou coaching) il y a déjà plus de 25 ans, ça a été une vraie révélation, parce que j’ai pu mettre à profit tout ce que j’avais appris par moi-même, à travers mes lectures, des apprentissages que j’avais choisis. Et mettre à profit ma créativité, ma pensée systémique et mes talents de communicante.
C’est ainsi que j’ai commencé, dès 2001, à imaginer des outils pédagogiques et des programmes de formation créatifs, dans l’objectif de permettre à toutes personnes, y compris celles qui sont « normales » de sortir de leurs paradigmes conceptuels (en pensant en dehors de la boite) et vivant des expériences qui ancrent ce qu’elles doivent apprendre. J’ai compris que tous mes dys-fonctionnements étaient un véritable atout pour ce métier, parce que tout le monde aime apprendre de façon inspirante et ludique !
Si j’explique tout cela dans cet article, c’est parce qu’il m’arrive souvent de croiser des personnes qui me demandent comment je fais pour être si créative et curieuse de tout. Je n’ose pas toujours leur dire que je ne fais pas exprès, parce que c’est dans ma nature du fait que je suis dyslexique.
J’ai peur d’inverser la situation et que les gens deviennent jaloux de moi parce qu’ils ne le sont pas ;o)
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